“Rosa Luxemburg était-elle marxiste? On sait en effet qu’elle a “révisé” plusieurs thèses concrètes défendues par Marx et Engels: sur l’indépendance de la Pologne, sur l’accumulation du capital, etc. Mais, paradoxalement, elle est un des disciples de Marx au XXe siècle qui ont été les plus fidèles à sa ‘méthode’. C’est  parce que pour elle justement le marxisme n’était pas une Summa Theologica, un ensemble figé de dogmes, un système de vérités éternelles établies une fois pour toutes, une séries de proclamations pontificales marquées du sceau de l’infallibilité – mais si, tout au contraire, une ‘méthode vivante’ qui doit être constamment développée pour saisir le processus historique concret (1). Tandis que la plupart des “marxistes” de son époque cherchaient à “améliorer”, “enrichir”, “supplémenter” ou “aider” la pensée de Marx par des étranges mariages avec Darwin (Kautsky), le matérialisme mécanique (Plékhanov), le positivisme “science-naturaliste” (Bukharine) ou Kant (K. Eisner, Vorlander, Max Adler) – mariages contre nature dont le produit était toujours intellectuellement bâtard – Rosa Luxemburg utilisant, comme instrument d’analyse et arme de combat, une dialectique matérialiste authentiquement marxiste.” [Michael Lowy, Dialectique et revolution. Essais de sociologie et d’histoire du marxisme, 1973] [(1) “(…) L’âme de toute la doctrine de Marx et la méthode dialectique-matérialiste d’examiner les problèmes de la vie sociale, méthode pour laquelle il n’y a pas de phénomènes, principes ou dogmes constants et immuables (…)” (Rosa Luxemburg, Préface à “La question polonaise et le mouvement socialiste” (1905)]