“La méthode historico-dialectique considère la société sous sa forme spécifiquement historique et les lois générales du développement social dans leurs manifestations concrètes en tant que lois d’une formation sociale déterminée, limitées dans leur action par le cadre historique de cette formation (8). Les catégories économiques sont donc aussi des “expressions théorique historiques, des stades déterminés du développement de la production matérielle correspondant aux rapports de production” (9). Ceux-ci n’ont pas un caractère éternel qui se conserverait en toutes circonstances, comme l’affirme l’économie bourgeoise, qui se perpétue ainsi puisqu’elle immortalise le mode de production capitaliste (10). Outre cette caractéristique fondamentale connue de la méthode marxiste, il faut encore relever; au niveau méthodologique, la question du “postulat” de l’équilibre: nous devons étudier de façon particulièrement détaillée cette méthode en raison, d’une part, de son extraordinaire importance et, d’autre part, à cause de la méconnaissance qu’en ont les représentations habituelles de la pensée marxiste. Dans son étude théorique du système des rapports de production capitalistes, Marx part de la constatation de son existence. Une fois que ce système existe, cela signifie que, bien ou mal, les besoins sociaux sont satisfaits pour le moins dans une proportion telle que les hommes puissent non seulement en pas mourir, mais vivre, travailler, se reproduire. Dans une société où existe la division sociale du travail  – et la société marchande capitaliste présuppose cette dernière -, cela signifie qu’un certain équilibre de tout le système doit s’établir. On produit la quantité nécessaire de charbon, de fer, de machines, de tissus, de grain, de sucre, de bottes, etc. On dépense pour la production de tout cela une quantité correspondante de travail humain vivant qui utilise la quantité nécessaire de moyens de production. Il se peut que l’ensemble dévie, qu’il oscille, que tout le système s’élargisse, se complique, se développe, se trouve dans un état de mouvement et d’oscillation continuels, mais dans l’ensemble un état d’équilibre s’établit (11). La découverte de cette loi d’équilibre constitue le problème fondamental de la théorie économique. Le résultat de la prise en considération du système capitaliste dans son ensemble, sous la condition de son équilibre, érige l’économie théorique en système scientifique. (…) Le systéme commence à osciller, devient mobile. Ces oscillations ne perdent toutefois pas leur caractère régulier et, malgré les plus brutales perturbations de l’équilibre (les crises), le système se maintient dans son ensemble. A travers les pertubations de l’équilibre apparaît un nouvel équilibre qui s’articule en façon plus complexe. Ensuite, si les lois de l’équilibre sont connues, nous pouvons aller plus loin et poser le problème des oscillations du système. Les crises même seront considérées non comme la disparition de l’équilibre, mais comme sa perturbation. A ce propos, Marx signale qu’il faut découvrir  la loi qui anime ce mouvement et comprendre non seulement de quoi vient cette perturbation de l’équilibre, mais aussi comment ce dernier sera restauré. La crise en sort pas des limites de l’oscillation du système. En conclusion de notre raisonnement, nous observons que le système bouge, oscille, mais que l’équilibre sera toujours rétabli au moyen de tous ces mouvements et oscillations” [N. Bucharin, ‘Les catégories économiques du capitalisme durant la période de transition’] [in Bucharin Preobrazhenskij Trotsky, ‘La débat sovietique sur la loi de la valeur’, Paris, 1972]  (pag 173-174) [(8) C’est là que l’on trouve le côté le plus révolutionnaire de la dialectique marxiste: “Connaissant le lien face à l’échec pratique, toute foi théorique retrouve son élan dans la nécessité permanente des conditions existantes, (“Lettre à Kugelmann”, op, cit.); (9) K. Marx, Misère de la philosophie, (10) Sur les questions méthodologique fondamentales, cf. ‘L’économie politique du rentier’; (11) Cfr,  la polémique d’Engels contre Rodbertus dans l’introduction du livre de Karl Marx ‘Misère de la philosophie]