“A chaque nouvelle langue apprise, Marx voyait s’ouvrir devant lui une littérature nouvelle qu’il étudiait aussi profondément que les autres. Il avait déjà plus de cinquante ans quand il se mit à apprendre le russe. On nous a conservé ses cahiers contenant les exercices auxquels il se livrait avec application, afin de pénetrer le mystère des déclinations et surtout des conjugaisons. Il faut voir comme il étudia à fond la littérature russe, économique, statistique” (La confession de Karl Marx, D. Riazanov, Ed. Spartacus, p. 12). Naturellement, il a lu tous les économistes de son temps, comme ceux de l’Antiquité. Mais pas seulement Ricardo, J.-B. Say, Ramsey, Adam Smith, Malthus, etc. Il connaît, il cite, à maintes reprises, Destutt de Tracy, Mercier de la Rivière, Le Trosne; que c’est beau tous ces noms dont pas un ne mourra. Il a lu tout ce que l’on a pu écrire sur le sujet, y compris les primitifs depuis des décades sombrés dans un oubli souvent mérité. Il a lu les ‘Meditazioni sulla economia politica’ publiées en 1773 par Pietro Verri, mais il connaît tout aussi bien ‘Some thougths on the Interest of Money in general, and particulary in the Public Funds’, écrit anonyme paru vers 1739 en Grande-Bretagne. Il n’ignore pas les ‘Eléments de commerce’ de Forgonnais (Leyde, 1766) non plus que les ‘Discourses upon trade’ que sir Dudley North a rassemblés en 1691 pour les porter à la connaissance de la postérité. Il a lu d’innombrables rapports d’Inspections de Fabriques, compulsé des monceaux de comptes rendus de débats parlementaires, mais il lit aussi les journaux américains, et il est au courant des “Décisions des travailleurs de Dunkirk, Etat de New York” prises en 1866. Il n’oublie pas Diodore de Sicile, il adore Shakespeare et Dante, il éprouve pour Aristote la seule admiration peut-être sans borne qu’il manifestera au cours de sa vie, mais il est aussi à l’aise pour dépiauter le ‘Deipnosophistarum d’Athenaeus’ que les ‘Ordonnances des Rois de France de la troisième race’ (1729 ou la ‘Lettre de Christophe Colomb de la Jamaïque’ (1505). Il n’a pas pioché tous ces auteurs au hasard des compilations; tout, il a tout vraiment lu. Et minutieux! Il a un extraordinaire souci du détail, une conscience professionnelle inflexible” [Michel Bousson, Une lecture bourgeoise de Karl Marx, 1983] (pag 18-19)
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- Articolo pubblicato:14 Dicembre 2012