“C’est la solution de ce probléme qu’a poursuivie Marx en élaborant sa conception ‘matérialiste’. Dans la préface d’une de ses oeuvres: ‘Critique de l’Economie Politique’, Marx raconte lui-même comment ses études l’amenèrent à cette conception: “Mes recherches aboutirent à ce résultat: que les rapports juridiques, ainsi que les formes de l’Etat, ne peuvent s’expliquer ni par eux-mêmes, ni par la soi-disant évolution génerale de l’esprit humain; qu’ils prennent leurs racines plutôt dans les conditions d’existence matérielles que Hegel, à l’exemple des Anglais et des Français du XVIIIe siècle, comprenait sous le nom de “société civile”” (1). Comme vous le voyez c’est le même résultat auquel nous avons vu aboutir les historiens, les sociologues et les critiques français de même que les philosophes idéalistes allemands. Mais Marx va plus loin. Il demande quelles sont les causes déterminantes de la société civile,et il répond que c’est dans ‘l’économie politique qu’il faut chercher l’anatomie de la société civile’. Ainsi c’est l’état économique d’un peuple qui détermine son état social, et l’état social d’un peuple détermine a son tour son état politique, religieux et ainsi de suite. Mais, demandez-vous, l’état économique n’est pas sans cause non plus? Sans doute, comme toutes choses ici-bas, il a sa cause à lui, et cette cause, ‘cause fondamentale de toute l’évolution sociale et partant de tout mouvement historique, c’est la lutte que l’homme mène avec la nature pour son existence'” [G. Plechanov, La conception matérialiste de l’histoire, Paris, 1946] [(1) ‘Contribution à la Critique de l’Economie politique’, par Karl Marx, traduction française par Laura Lafargue, p. 4]