“Vers le milieu de 1846 le Comité de Bruxelles proposa à la discussion un projet de congrès international des communistes de tous les pays à tenir dans un proche avenir. Peut-être cette proposition avait-elle pour origine Schapper qui avait motivé l’adhésion des communautés londoniennes au Comité de Bruxelles par la nécessité de créer une organisation commune de tous les communistes. Nous ne savons pas exactement quel accueil fut fait à cette proposition. En novembre 1846 la direction centrale de la Ligue des Justes allait passer de Paris à Londres. Alors que les Parisiens étaient affaiblis par les persécutions policières, les communautés de Londres s’étaient renforcées. Ses membres dirigeaient les deux grandes associations ouvrières pour la culture qui comptaient au total environ cinq cents membres, et ils entretenaient de bonnes relations avec l’aile radicale des chartistes. Ils étaient en passe de se dégager du communisme artisanal et la nouvelle direction, composée d’hommes comme Schapper, Bauer, Moll, Pfänder, Eccarius inclinait de plus en plus vers des conceptions scientifiques. La nouvelle autorité centrale adressa aux communautés en novembre 1846 une circulaire proposant la constitution d’un parti vigoureux recherchant une transformation radicale de la société, l’élaboration d’une “profession de foi communiste simple qui pût servir à tous de ligne directrice” et la convocation d’un congrès de la Ligue pour le Ier mai 1847, lequel ne serait que le précurseur d’un congrès universel des communistes pour 1848. Elle reprenait ainsi une idée mise en avant par le Comité de Bruxelles. Mais elle ne l’en informait pas, celui-ci ne faisant pas partie de la Ligue des Justes. Il semble que les bons rapports qui existaient entre Londres et Bruxelles aient été troublés pendant un temps, car Engels met en décembre 1846 Marx en garde contre une rupture avec les Londoniens. De son côté l’autorité centrale se rendit vite compte qu’elle ne pourrait pas à elle seule régénérer la Ligue des Justes. La circulaire de novembre était pratiquement restée sans réponse. Elle décida donc d’envoyer fin janvier 1847 un émissaire, Joseph Moll, auprès du Comité de Bruxelles pour obtenir son adhésion à la Ligue. Nous ne savons pas sur quelles bases se firent les négociations. Toujours est-il que Marx et Engels se décidèrent enfin à adhérer à la Ligue et transformèrent le Comité de correspondance en Communauté des Justes. La liaison directe était établie entre les tenants du socialisme scientifique et les ouvriers communistes organisés. L’activité des Bruxellois signifiait un renforcement pour la Ligue et l’idée d’une profession de foi communiste avait été lancée. Les conditions pour la naissance du ‘Manifeste communiste’ étaient désormais réunies. La fondation de la ligue des communistes. L’autorité centrale lança en février 1847 une nouvelle circulaire qui reprenait pour l’essentiel le contenu de celle de novembre, mais dont le ton était manifestement plus résolu. Prenant en exemple le mouvement chartiste, les auteurs regrettent que le communistes ne constituent pas encore un parti prolétarien indépendant, car “nous sommes à la veille d’une révolution qui va probablement décider du sort de l’humanité pour des siècles”. Les communistes sont à la tête du mouvement, et il serait temps qu’ils aient leur propre drapeau. Après avoir rappelé encore une fois la “courte profession de foi communiste”, la circulaire fixait la date du congrès au 1er juin 1847. Nous savons maintenant, grâce aux découvertes de Bert Andréas, que ce congrès eut effectivement lieu du 2 au 9 juin et qu’il rédigea en effet un projet de profession de foi dont le texte est important, car il jalonne le chemin parcouru par la Ligue entre juin et décembre, date de son deuxième congrès. Engels assista aux travaux de ce congrès en qualité de délégué des communautés parisiennes. Il y joua certainement un très grand rôle, puisque la profession de foi retrouvée est de sa main, s’il n’en est toutefois pas l’auteur. En tout cas les décisions prises furent extrêmement importantes, puisque la Ligue résolut de se transformer en Ligue des communistes et qu’elle adopta comme devise la phrase qui figure à la fin du ‘Manifeste’: “Prolétaires de tous les pays, unissez-vous!” en remplacement de la vieille formule: “Tout les hommes sont frères”” [E. Bottigelli, Introduction, (in) Karl Marx Friedrich Engels, Manifeste du parti communiste, 1971]
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- Articolo pubblicato:3 Aprile 2013